Description

Sun Sets in Stone

Dans son œuvre Sun Sets in Stone, l’artiste conceptuel suisse Julian Charrière chamboule le temps et l’espace ; il jette un pont sur un temps profond rendant floue la frontière entre l’organique et le géologique, le vivant et le fossile. Cette œuvre marque la poursuite des expérimentations du photographe, plasticien et vidéaste avec la double exposition argentique, un processus imprévisible où l’image finale est soumise plus au hasard qu’à la volonté du photographe. Deux sujets distincts – ici, une forêt ennuagée en Équateur et une trace matérielle de la période carbonifère – sont réunis sur un seul négatif en noir et blanc grâce à l’utilisation d’un appareil photo moyen format argentique, créant ainsi un instantané de macro-écosystèmes à la fois passés et présents.

Pour ce faire, Julian Charrière a tout d’abord sondé les sous-bois épais d’une forêt embrumée des Andes occidentales, dense de fougères arborescentes, d’orchidées et de broméliacées. Point chaud de la biodiversité en Équateur, ce site est à la fois riche d’une grande variété d’êtres vivants et d’écosystèmes, et, dans le même temps, profondément menacé par la surexploitation des ressources, le changement climatique ainsi que les complexes agro-industriels mondiaux. Sur la même pellicule, l’artiste a ensuite détaillé un fossile de l’ère carbonifère, glané dans la collection géologique du Musée d’histoire naturelle de Berlin. En superposant une forêt du présent et les vestiges d’un royaume primitif du passé, Sun Sets in Stone donne vie à un écosystème panchronique propre qui, bien qu’existant à 350 millions d’années d’intervalle, reste inextricablement lié à la synapse organique de la planète Terre.

Tirée selon un procédé d’impression nommé « piezographie » utilisant des encres pigmentaires au charbon, l’œuvre d’art de Julian Charrière met également en avant la question de l’exploitation des ressources, explicitant la vitalité qui habite nos combustibles fossiles. De même, la nature inattendue de la surimpression symbolise la croyance hubristique de l’humanité en sa capacité à contrôler les cycles biogéochimiques sans les perturber. Créée dans le cadre de Calls for Action auquel participe Julian Charrière avec une installation mêlant art public, centres urbains et forêts menacées de régions reculées (par le biais de transmissions multimédias en direct), l’œuvre Sun Sets in Stone fonctionne elle aussi comme un portail, non seulement entre deux mondes, mais également vers de nouvelles formes de créations collectives de sens, au-delà de l’échelle-temps humaine. Sun Sets in Stone est aussi un douloureux rappel de la dette souvent oubliée de la société industrialisée à l’égard de l’action et du développement de la vie végétale. Sun Sets in Stone célèbre les gardiens végétaux de notre planète – une présence sans laquelle l’assaut du changement climatique serait encore bien plus rude – tout en commémorant les spectres de leur existence – qui se volatilisent dans l’atmosphère chaque fois que nous brûlons aveuglément du charbon, du pétrole et du gaz naturel.

L’intégralité des bénéfices de la vente de cette édition sera reversée à la fondation à but non lucratif Art into Acres afin de contribuer à la préservation stratégique de la forêt tropicale par le biais de programmes spécifiques, sélectionnés dans le cadre du projet d’art public Calls for Action.